Dès le 17 avril 1940, les gouvernements français, polonais (en exil) et anglais dénoncent « la persécution des Polonais, le traitement atroce infligé à la communauté juive en Pologne ». Le 25 octobre 1941, Winston Churchill, premier ministre anglais, évoque , « parmi les buts majeurs de la guerre » le châtiment des crimes commis dans les pays occupés par l'Allemagne. La déclaration de Saint James (13 janvier 1942) est signée par les dirigeants des pays occupés et des gouvernements en exil à Londres, dont de Gaulle. les signataires « placent parmi leurs principaux buts de guerre le châtiment par le moyen de la justice organisée des responsables de ces crimes » La déclaration de Moscou (30 octobre 1943) signée de Churchill, Staline et Roosevelt précise les choses :
Le Royaume-Uni, les
États-Unis
d'Amérique et l'Union des Républiques socialistes
soviétiques ont reçu de nombreuses sources la
preuve des
atrocités, des massacres et des exécutions en
masse
effectués de sang-froid par les forces
hitlériennes dans un grand nombre de pays qu'elles ont
envahis,
et
d'où elles sont actuellement en voie d'être
systématiquement
chassées. La bestialité associée
à la
domination
nazie n'est pas chose nouvelle, et tous les peuples et territoires qui
sont
sous ce joug ont été les victimes de la pire
forme de
gouvernement
par la terreur. Ce qui est nouveau, c'est que plusieurs de ces
territoires
sont en voie d'être délivrés par
l'avance des
armées libératrices, et que, dans leur rage, les
Huns
redoublent de cruauté à mesure qu'ils reculent.
Ceci est
prouvé très clairement par les crimes monstrueux
commis
sur le territoire de l'Union soviétique, en voie de
libération, ainsi que sur les territoires
français et
italien. En conséquence, les susdites trois puissances alliées, parlant au nom et dans l'intérêt des 33 Nations Unies, proclament solennellement ce qui suit, et donnent avertissement de leur proclamation : lorsqu'un armistice sera accordé à un gouvernement formé en Allemagne, quel qu'il soit, les officiers et soldats allemands et les membres du Parti nazi qui ont été responsables, ou qui ont donné leur consentement aux atrocités, massacres et exécutions dont il a été question, seront renvoyés dans les pays où ils auront perpétré leurs abominables forfaits, pour y être jugés et châtiés conformément aux lois de ces pays libérés et des gouvernements libres qui y seront formés. Des listes seront établies avec tous les détails possibles, dans chacun de ces pays, et particulièrement dans les territoires envahis de l'Union soviétique, de la Pologne, de la Tchécoslovaquie, de la Yougoslavie et de la Grèce (y compris la Crète et les autres îles), de la Norvège, du Danemark, de la Hollande, de la Belgique, du Luxembourg, de la France et de l'Italie. Ainsi les Allemands qui ont pris part aux fusillades en masse des officiers polonais, à l'exécution d'otages français, hollandais, belges, norvégiens et de paysans crétois, ou qui ont pris part aux massacres effectués en Pologne et dans les territoires de l'Union soviétique actuellement arrachés à l'ennemi, ces Allemands sauront qu'ils seront ramenés sur la scène de leurs crimes et jugés sur place par les peuples qu'ils auront martyrisés. Que ceux qui n'ont pas jusqu'à présent trempé leurs mains dans le sang innocent sachent ce qui les attend s'ils deviennent eux-mêmes des coupables. Car il est certain que les trois puissances alliées les poursui vront jusqu'au bout de la terre et les remettront aux mains de leurs accusateurs pour que justice soit faite. La déclaration ci-dessus ne préjuge pas du cas des criminels de guerre allemands dont les crimes ont été commis sans qu'il soit possible de les localiser géographiquement. Ceux-là seront punis par une décision commune des gouvernements alliés. » |
La Conférence de Postdam (août 1945) explique dans un communiqué final que « Les trois gouvernements ont réaffirmé leur intention de juger rapidement les grands criminels de guerre dont les crimes n'ont pas de localisation géographique. »
Le Tribunal de Nuremberg a été créé le 8 août 1945 par l'Accord quadripartite de Londres (Royaume-Uni, URSS, Etats-Unis et France). Cet accord constitue le Statut du Tribunal :
1. Constitution du Tribunal Militaire International Article premier En exécution de l’Accord signé le 8 août 1945 par le Gouvernement Provisoire de la République Française, le Gouvernement des Etats-Unis d’Amérique, du Royaume Uni de Grande-Bretagne et de l’Irlande du Nord, et de l’Union des Républiques Socialistes Soviétiques, un Tribunal Militaire International (dénommé ci-après « le Tribunal »), sera créé pour juger et punir de façon appropriée et sans délai, les grands criminels de guerre des pays européens de l’Axe. Article 2 Le Tribunal sera composé de quatre juges, assistés chacun d’un suppléant. Chacune des puissances signataires désignera un juge et un juge suppléant. Les suppléants devront, dans la mesure du possible, assister à toutes les séances du Tribunal. En cas de maladie d’un membre du Tribunal, ou si, pour toute autre raison, il n’est pas en mesure de remplir ses fonctions, son suppléant siègera à sa place. Article 3 Chaque Signataire prendra les mesures nécessaires pour assurer la présence aux enquêtes et aux procès des grands criminels de guerre qu’il détient et qui devront être jugés par le Tribunal Militaire International. Les Signataires devront également employer tous leurs efforts pour assurer la présence aux enquêtes et aux procès devant le Tribunal Militaire International de ceux des grands criminels qui ne se trouvent pas sur le territoire de l’un des Signataires. Article 4 a) La
présence des quatre membres
du Tribunal ou, en l’absence de l’un
d’eux, de son suppléant,
sera nécessaire pour constituer le quorum.
Article 5 En cas de
nécessité et
selon le nombre des procès à juger,
d’autres tribunaux
pourront être créés ; la composition,
la
compétence et la procédure de chacun de ces
tribunaux
seront identiques et seront réglées par le
présent
Statut. II. Juridictions et principes généraux. Article 6 Le Tribunal
établi par l’Accord
mentionné à l’article premier ci-dessus
pour le jugement
et le châtiment des grands criminels de guerre des pays
européens de l’Axe, sera
compétente pour juger et punir toutes personnes qui,
agissant
pour
le compte des pays européens de l’Axe, auront
commis,
individuellement
ou à titre de membres d’organisations,
l’un quelconque des
crimes
suivants : Les dirigeants, organisateurs, provocateurs ou complices qui ont pris part à l’élaboration ou à l’exécution d’un plan concerté ou d’un complot pour commettre l’un quelconque des crimes ci-dessus définis sont responsables de tous les actes accomplis par toutes personnes, en exécution de ce plan. Article 7 La situation officielle des accusés, soit comme chef d’Etat, soit comme hauts fonctionnaires, ne sera considérée ni comme une excuse absolutoire, ni comme un motif de diminution de la peine. Article 8 Le fait que l’accusé a agi conformément aux instructions de son gouvernement ou d’un supérieur hiérarchique ne le dégagera pas de sa responsabilité, mais pourra être considéré comme un motif de diminution de la peine, si le Tribunal décide que la justice l’exige. Article 9 Lors d’un procès intenté contre tout membre d’un groupement ou d’une organisation quelconque, le Tribunal pourra déclarer (à l’occasion de tout acte dont cet individu pourrait être reconnu coupable) que le groupement, ou l’organisation à laquelle il appartenait était une organisation criminelle. Après avoir reçu l’Acte d’accusation, le Tribunal devra faire connaître, de la manière qu’il jugera opportune, que le Ministère public a l’intention de demander au Tribunal de faire une déclaration en ce sens et tout membre de l’organisation aura le droit de demander au Tribunal à être entendu par celui-ci, sur la question du caractère criminel de l’organisation. Le Tribunal aura compétence pour accéder à cette demande ou la rejeter, le Tribunal pourra fixer le mode selon lequel les requérants seront représentés et entendus. Article 10 Dans tous les cas où le Tribunal aura proclamé le caractère criminel d’un groupement ou d’une organisation, les autorités compétentes de chaque Signataire auront le droit de traduire tout individu devant les tribunaux nationaux, militaires ou d’occupation en raison de son affiliation à ce groupement ou à cette organisation. Dans cette hypothèse, le caractère criminel du groupement ou de l’organisation sera considéré comme établi et ne pourra plus être contesté. Article 11 Toute personne condamnée par le Tribunal pourra être inculpée devant un tribunal national, militaire ou d’occupation, mentionnés à l’article 10 ci-dessus, d’un crime autre que son affiliation à une organisation ou à un groupement criminels, et le tribunal saisi pourra, après l’avoir reconnu coupable, lui infliger une peine supplémentaire indépendante de celle déjà imposée par le Tribunal pour sa participation aux activités criminelles de ce groupement ou de cette organisation. Article 12 Le Tribunal sera compétent pour juger en son absence tout accusé ayant à répondre des crimes prévus par l’article 6 du présent Statut, soit que cet accusé n’ai pu être découvert, soit que le Tribunal l’estime nécessaire pour tout autre raison, dans l’intérêt de la Justice. Article 13 Le Tribunal établira les règles de sa procédure. Ces règles ne devront en aucun cas être incompatibles avec les dispositions du présent Statut. III. Commission d’instruction et de poursuite de grands criminels de guerre. Article 14 Chaque Signataire
nommera un
représentant du Ministère Public, en vue de
recueillir
les charges et d’exercer les poursuites contre les grands
criminels de
guerre. Article 15 Les membres du
Ministère Public,
agissant individuellement et en collaboration les uns avec les autres,
auront également les fonctions suivantes :
Il est entendu
qu’aucun témoin ou
accusé détenu par l’un des Signataires
ne pourra
être retiré de sa garde sans son
consentement. IV – Procès équitable des accusés. Article 16 Afin
d’assurer que les accusés
soient jugés avec équité, la
procédure
suivante sera adoptée : V – Compétence du Tribunal et conduite des débats. Article 17 Le Tribunal sera
compétent : Article 18 Le Tribunal devra
: Article 19 Le Tribunal ne sera pas lié par les règles techniques relatives à l’administration des preuves. Il adoptera et appliquera autant que possible une procédure rapide et non formaliste et admettra tout moyen qu’il estimera avoir une valeur probante. Article 20 Le Tribunal pourra exiger d’être informé du caractère de tout moyen de preuve avant qu’il ne soit présenté, afin de pouvoir statuer sur sa pertinence. Article 21 Le Tribunal n’exigera pas que soit rapportée la preuve de faits de notoriété publique, mais les tiendra pour acquis. Il considèrera également comme preuves authentiques les documents et rapports officiels des Gouvernements des Nations Unies, y compris ceux dressés par les Commissions établies dans les divers pays alliés pour les enquêtes sur les crimes de guerre ainsi que les procès verbaux des audiences et les décisions des tribunaux militaires ou autres tribunaux de l’une quelconque des Nations Unies. Article 22 Le siège permanent du Tribunal sera à Berlin. La première réunion des membres du Tribunal, ainsi que celle des représentants du Ministère Public, se tiendra à Berlin, en un lieu qui sera fixé par le Conseil de contrôle pour l’Allemagne. Le premier procès se déroulera à Nuremberg et tous procès ultérieurs auront lieu aux endroits choisis par le Tribunal. Article 23 Un ou plusieurs représentants du Ministère Public pourront soutenir l’accusation dans chaque procès. Chaque représentant du Ministère Public pourra remplir ses fonctions personnellement ou autoriser toute personne à les remplir. Les fonctions de défenseur peuvent être remplies sur la demande de l’accusé par tout avocat régulièrement qualifié pour plaider dans son propre pays ou pour toute autre personne spécialement autorisée à cet effet par le Tribunal. Article 24 Le procès
se déroulera
dans l’ordre
suivant : Article 25 Tous les documents
officiels seront
produits et toute la procédure sera conduite devant le
Tribunal
en français, en anglais, en russe et dans la langue de
l’accusé. Le compte rendu des débats
pourra être
aussi traduit dans la langue du pays
où siègera le Tribunal, dans la mesure
où celui-ci
le
considèrera désirable dans
l’intérêt de la
Justice
et pour éclairer l’opinion publique.
VI. Jugement et peine Article 26 La décision du Tribunal relative à la culpabilité ou à l’innocence de tout accusé devra être motivée et sera définitive et non susceptible de révision. Article 27 Le Tribunal pourra prononcer contre les accusés convaincus de culpabilité la peine de mort ou tout autre châtiment qu’il estimera juste. Article 28 En plus de toute peine qu’il aura infligée, le Tribunal aura le droit d’ordonner à l’encontre du condamné la confiscation de tous biens volés et leur remise au Conseil de Contrôle pour l’Allemagne. Article 29 En cas de
culpabilité, les
décisions seront exécutées
conformément aux
ordres du Conseil
de Contrôle pour l’Allemagne, et ce dernier aura le
droit,
à
tout moment, de réduire ou de modifier, d’autre
manière
les
décisions, sans toutefois pouvoir en aggraver la
sévérité.
Si, après qu’un accusé a
été reconnu
coupable
et condamné, le Conseil de Contrôle pour
l’Allemagne
découvre de nouvelles preuves qu’il juge de nature
à
constituer une charge
nouvelle contre l’accusé, il en informera la
Commission
prévue
par l’article 14 du présent Statut, afin que
celle-ci prenne
telle
mesure qu’elle estimera appropriée dans
l’intérêt
de
la Justice. VIII. Dépenses Article 30 Les dépenses du Tribunal et les frais des procès seront imputés par les Signataires sur les fonds affectés au Conseil de Contrôle pour l’Allemagne.
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Le Tribunal de Nuremberg se réunit de novembre 1945 à octobre 1946.
Voir page sur Le procès de Nuremberg
La définition du crime contre l'humanité
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